Le syndicat français de la magistrature dénonce l’accord sur l’entraide judiciaire entre Paris et Rabat

Le syndicat français de la magistrature dénonce l’accord sur l’entraide judiciaire entre Paris et Rabat

Trois mois après le réchauffement des relations entre le Maroc et la France et après aussi la signature d’un protocole d’amendement à l’accord d’entraide judiciaire entre les deux pays, le Syndicat français de la magistrature œuvre à torpiller la ratification de l’accord qui doit passer en procédure accélérée à l’Assemblée nationale.

« Début 2014, le Maroc a entamé un bras de fer inacceptable avec la France en suspendant toute coopération judiciaire pénale (... ). Pour renouer cette coopération, la France semble aujourd’hui prête à tous les compromis », proclame un communiqué du syndicat, marqué à gauche. L’objectif est d’amener les parlementaires socialistes – et les autres si possible – à ne pas voter le texte du protocole signé le 6 février 2015.

Le communiqué dénonce la procédure accélérée qui, selon lui, risque « de donner trop de visibilité à ces ‘petits arrangements entre amis’ et aux inacceptables renoncements qui les accompagnent », à savoir « le sacrifice du secret de l’instruction et de l’enquête comme de la sécurité des victimes et témoins des affaires sensibles » et « la remise en cause des engagements internationaux de la France qui, sur le fondement de la compétence extraterritoriale, est tenue d’assurer un accès effectif au juge national pour la poursuite et le jugement des crimes internationaux mettant en cause des personnes se trouvant en France ».

Le syndicat cite à cet effet l’Association chrétienne pour l’abolition de la torture, ACAT, qui était montée au créneau en mars, dénonçant elle aussi le protocole conclu entre Rabat et Paris.

Dans un mémorandum de réponse à l’ACAT, Me Mohamed Tayeb Omar, l’un des défenseurs de l’Etat du Maroc contre Zakaria Moumni – Franco-marocain à l’origine des poursuites engagées contre le directeur de la DST marocaine –, avait expliqué en quoi le protocole est conforme aux dispositions de la Convention de New York contre la torture et les traitements dégradants, ainsi qu’à l’accord d’entraide judiciaire signé entre la France et le Maroc en 2008.

Ainsi, pour « le secret de l’instruction », en cas de saisine de la justice de France par un citoyen de l’un ou l’autre des deux pays, les magistrats ne sont tenus que d’en informer leurs homologues marocains, sans leur fournir le fond du dossier ni les éléments à charge ou à décharge. De plus, pour « l’enterrement des procédures », la justice française pourrait reprendre chaque affaire qui ne serait pas traitée par les juges marocains, ou qui le serait d’une manière qui ne réponde pas aux critères de justice internationaux. De cette façon, considérer, comme le fait le syndicat, que « la France serait soumise à la raison d’État marocaine », est excessif et tend à politiser une entraide judiciaire dont la suspension unilatérale par le Maroc en mars 2014 avait lésé les intérêts des citoyens des deux pays.

 

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