La société de logiciels espions Hacking Team devient Hacked Team, et le Maroc est un de ses clients

La société de logiciels espions Hacking Team devient Hacked Team, et le Maroc est un de ses clients

En cette année de grâce 2015 la version de l’arroseur arrosé s’est transformée en hacker hacké ou pirate piraté, et le sourire d’antan est devenu rictus. La société italienne « Hacking team » a en effet été piratée et ce sont 400 gigaoctets d’informations et autres données qui se sont volatilisées, une fuite massive qui contiendrait des emails et documents internes, plus les codes sources de plusieurs logiciels conçus par l’entreprise. On apprend également que plusieurs pays sont clients de cette société, dont le Maroc…

Hacking Team est considérée par Reporters sans Frontières comme l'une des « cinq entreprises ennemies d'internet », avec Amesys, pour sa fourniture de spywares et de malwares destinés à espionner la population. Le spyware Remote Control system a été créé par cette société italienne qui l’a vendu à plusieurs pays, dont le Maroc. Les services de ces Etats peuvent ainsi avoir libre accès aux systèmes IOS, Android ou encore Blackberry de même qu’ils peuvent enregistrer des conversations téléphoniques Skype et Viber. Plus de confidentialité, plus d’anonymat, les services savent tout, et stockent tout. Le système poétiquement appelé Da Vinci permet en outre l’activation à distance de webcams ou de micros intégrés de postes informatiques.

On peut objecter qu’ainsi sont les impératifs de la lutte antiterroriste mais on peut affirmer aussi que les services, boulimiques de toute sorte d’informations, peuvent également espionner des personnes morales et surtout physiques, pour utiliser leurs informations au moment voulu. Il n’y a jamais de petits profits… ni de petites écoutes.

En effet, des révélations de l’entreprise russe en sécurité informatique Kaspersky et des chercheurs du Citizen Lab (lié à l’université de Toronto) ont affirmé que Hacking Team proposait des systèmes de surveillance à plusieurs Etats à respectabilité variable, mais aussi à des dictatures et gouvernements oppressifs, comme le Kazakhstan, le Soudan, l’Arabie Saoudite ou l’Ethiopie.

Une entreprise, c’est fait pour gagner de l’argent et Hacking team (désormais Hacked team) est en relations avec plusieurs pays et grandes entreprises. Pour le cas du Maroc, en 2012, les ordinateurs de journalistes citoyens marocains ont par exemple été infectés par un logiciel espion suspecté d’avoir été conçu par l’entreprise. Le mouvement Mamfakinch en sait quelque chose.

L’avantage de cette histoire est que les gouvernements, comme les individus, apprendront les désagréments de voir leurs secrets, à eux aussi, étalés en public. Après Wikileaks et les télégrammes diplomatiques de l’Oncle Sam, voici venu le tour de Hacking Team, en attendant d’autres révélations… Dans l’intervalle, nous savons que nous sommes tous espionnés, ici et ailleurs. Mais bon, puisque même Angela Merkel et François Hiollande le sont, on peut relativiser les choses et les prendre avec une certaine philosophie.

Pour l’anecdote, un jour, dans les années 70 du siècle dernier déjà, le roi défunt Hassan II avait dit à un de ses collaborateurs  qui s’était ouvert à lui de certaines informations (et qui a nous ensuite relaté cette histoire) : « Ne me dis jamais ces choses-là au téléphone, je ne veux pas que tout le monde, au Maroc et à l’étranger, les apprenne aussi »…

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