La télé algérienne Ennahar accuse le Maroc d’être impliqué dans les événements de Ghardaïa (vidéo)
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- 10 juillet 2015 --
- International
Alors que la région de Ghardaïa est à feu et à sang, secouée par des violences communautaires opposant Arabes et Amazigh, les partis algériens chargent le pouvoir, qui botte en touche et attaque le Maroc. La chaîne de télévision progouvernementale Ennahar a ainsi développé un sujet accusant directement le Maroc, et le palais, d’avoir fomenté les troubles dans une région et un pays qui n’a pas nécessairement besoin d‘une « intervention » étrangère pour prendre feu à tout moment.
Déjà, en 2014…
Même lieu d’affrontements, Ghardaïa, et même responsable épinglé par les Algériens, le Maroc… l’été dernier, quand des heurts avaient opposé les deux communautés, l’association des oulémas d’Algérie, ou Conseil des sages, (repris par Ennahar), avait remis un rapport au premier ministre Abdelmalek Sellal affirmant que les événements ne sont pas idéologiques (sic) mais plutôt « ourdis par une main étrangère immédiatement après le Festival amazigh au Maroc ». Les Sages pensent dur comme fer que « le Maroc tente d’exploiter le conflit intercommunautaire à Ghardaïa pour porter atteinte à l’intégrité territoriale de l’Algérie »… Obsessionnel…
Et maintenant, en juillet 2015…
La chaîne de télévision Ennahar TV (voir infra) a consacré un sujet aux événements de Ghardaïa. Le (très) jeune journaliste explique donc que « suite aux investigations menées par les services de sécurité, il ressort que Kamal Fekhar (militant amazigh algérien, NDLR) a rencontré le conseiller du roi Mohammed VI pour les questions culturelles (sic) pour se concerter en vue d’inciter les habitants de Ghardaïa à réclamer l’autonomie de leur région… les investigations menées par les services sont parvenues à établir la preuve de l’implication du Makhzen dans la création du Mouvement pour l’autonomie des Mozabites (les Imazighen de Ghardaïa), sur instigation de Fekhar pris en charge par le Makhzen, grâce à l’entremise du dénommé Ahmed Aassid, membre de l’institut royal de la culture amazigh (re-sic) ». Le présentateur explique en outre que le roi Mohammed VI a tenu plusieurs réunions, toujours selon les services algériens, avec les activistes de Ghardaïa, avant, pendant et après les événements, s’engageant à donner de l’argent et à soutenir les émeutiers dans les instances internationales en contrepartie de l’établissement d’une province autonome…
La question est de savoir pourquoi est-ce uniquement Ennahar qui a eu vent des rapports des services algériens, s’ils existent vraiment et s’ils sont exacts ?… Les autres médias algériens, et les partis, s’en sont pris à l’Etat algérien et au gouvernement, responsables selon eux de la détérioration de la situation dans cette région du centre du pays.
Qui est Ennahar ?
Une télé adossée au journal éponyme, crée en 2007. Quatre ans après, le couple fondateur du groupe a pu lancer une télévision, qui se présente comme étant indépendante du pouvoir algérien. Pourtant, elle est la seule à disposer des informations émanant des services algériens, le mari Aziz Rahmani et son épouse Souad Azzouz ayant été tous deux des spécialistes de l’information sécuritaire alors qu’ils travaillaient ensemble dans un autre organe de presse, al Khabar, réputé pour être un périodique (très proche) de l’armée.
C’est sans doute pour cela que lors de chaque opération terroriste, c’est toujours Ennahar qui est en pointe dans l’information, toujours mono-source, c’est-à-dire les services. C’est elle qui a révélé les premières informations sur le Français décapité par les daechistes algériens de « Jund al Khlifa » en septembre 2014 … et c’est encore Ennahar qui a diffusé les images des otages de la prise d’otages d’in Amenas en janvier 2013… Et c’est toujours Ennahar qui a été l’un des (très) rares médias algériens à soutenir la candidature d’un Abdelaziz Bouteflika très souffrant pour son cinquième mandat, « au nom de la stabilité du pays », disait-elle, sans rire
Cela étant, quatre ans après la fondation du quotidien Ennahar, le couple lance la télé. Nous sommes en 2011… et quelques temps après, le groupe s’installe dans des locaux flambants neufs, dans un immeuble de 6 étages. La source du financement ? Les recettes publicitaires, dans un pays où les plus grands annonceurs sont des entreprises d’Etat.
Ah, si cela pouvait être aussi facile de s’acheter un immeuble et de (bien) l’équiper en seulement 4 ans de recettes pub…
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