Accord historique à la COP21 (et pression sur le Maroc)

Accord historique à la COP21 (et pression sur le Maroc)

« Si chacun exige 100%, finalement chacun obtient 0% », avait très justement expliqué le président de la Conférence des Parties COP21 Laurent Fabius hier, avant le sprint final pour arracher un accord. 195 pays participent à cette conférence, et ce fameux accord, désormais vraiment historique car chiffré et « juridiquement contraignant », a été enfin signé.

Il sera ouvert à la signature au siège de l’ONU à New York durant un an, du 22 avril 2016 au 21 avril 2017, et entrera en vigueur après sa ratification par au moins 55  signataires représentant au moins 55% des émissions totales de GES mais pas avant le 1er janvier 2020.

Le texte comporte une décision, suivie de l’accord lui-même.  

Que dit, globalement, l’accord signé ?

L'objectif de l'accord est de contenir la hausse moyenne de la température de la planète « bien en-deçà de 2°C » en 2100 par rapport à l'ère préindustrielle, un niveau qui a permis de poursuivre le texte par la promesse  de « poursuivre les efforts » pour limiter cette hausse de la température à 1,5°C.

Dans cette perspective, les signataires devront atteindre « aussi tôt que possible » un pic d'émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), étant entendu que ce « plafonnement impose des réductions plus fortes des émissions des pays développés et prendra plus de temps pour les pays en développement ».

Avec quel argent ?
               
Les pays riches aideront  les pays en développement dans leur politique de réduction de leurs émissions et d'adaptation.  Dans cet objectif, ils s'engagent à fournir des ressources financières à ceux qui en auront besoin.            

Le chiffre de 100 milliards de dollars par an que les pays développés se sont engagés à mobiliser d'ici 2020 lors de la conférence de Copenhague en 2009, n'est mentionné que dans la décision. Ce montant y est considéré comme un « plancher » pour l'après-2020 et un nouvel objectif chiffré devra être défini au plus tard d'ici 2025.
               
Quels sont les engagements des signataires ? 

Acceptant le principe d’un bilan global tous les cinq ans, avec le premier en 2023, les 195 pays signataires s'engagent à élaborer et exécuter des plans nationaux de réduction de ses émissions de GES. Ces contributions ne pourront être révisées qu'à la hausse.

« Toutes les parties devraient coopérer pour renforcer la capacité des pays en développement à mettre en œuvre cet accord »…  Les nations  « en mesure de le faire »  apporteront leurs concours financiers et les transferts de technologie susceptibles de contribuer à la décarbonation de l'économie et à l'adaptation aux pays en développement pour les aider dans la mise en œuvre de l'accord.

Chaque état devra communiquer tous les cinq ans un plan de réduction des gaz à effet de serre, en fonction d’un bilan mondial.

Pression sur le Maroc

Le Maroc, en tant que pays qui recevra la COP22, devra veiller à maintenir l’élan de la première année. Il devra pour cela déployer sa diplomatie, collective, multilatérale et bilatérale, pour rapprocher les extrêmes. En effet, les grands pays industriels et les royaume et émirats pétroliers, grands pollueurs devant l’Eternel, s’accordent à dire que « cet accord n’est pas parfait ».

L'incertitude aura dura jusqu'au dernier jour, la dernière heure. Une sorte de suspense aussi... Les grands pays d'Amérique et d'Europe et les Etats pétroliers (tous grands partenaires économiques et politiques du Maroc) viendront à Marrakech, dans un an, pour faire état de leurs premières contraintes, pour soumettre leurs premières propositions d'amendement. L'enjeu sera de maintenir et de faire vivre l'Accord de Paris, et cela représentera un défi, un défi important car international, universel, historique. Rabat devra le relever.

Le Maroc sera l’hôte des premières contestations et des premières fissures de cet accord destiné à sauver la planète. De la même manière que la diplomatie française s’est mobilisée pour faire aboutir les négociations à un accord en une douzaine de jours et que cela est considéré comme un succès personnel du président Hollande et de son ministre des Affaires étrangères, au Maroc, les chef d’Etat, de gouvernement et de la diplomatie devront à leur tour tenir le gouvernail dans un an.

Le chef du gouvernement et son ministre n’auront pas encore bouclé leurs 100 premiers jours – sauf en cas de reconduction…

Voilà ce qu’a déclaré le représentant du Maroc à paris ce samedi après la signature de l’accord : « Nous avons, pour la première fois dans l'histoire moderne, réussi à porter un accord transformationnel. Il n'y a pas de gagnant ni de perdant dans cet accord. Nous avons contribué à renforcer le multilatéralisme. La COP21, qui demeurera historique, prend fin aujourd'hui. Mais ce n'est pas la fin de notre histoire commune : c'est une nouvelle étape, pour rendre opérationnel l'accord de Paris et cela démarrera à Marrakech du 7 au 18 novembre 2016 ».

Dans un an, donc, la COP22 ne devra pas être seulement une rencontre touristique, une grand-messe gastronomique et mondaine. Elle devra maintenir l'élan de la COP21, comme dans une course de relais, dont le témoin serait l'Accord de Paris  et les coureurs seront  les pays organisateurs des COP à venir. Si l'un tombe, tout tombera à l'eau, dont le niveau augmentera...

 

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