Que se passe-t-il en Turquie ? Purges, « nettoyage » et « grand ménage » ont commencé

Que se passe-t-il en Turquie ? Purges, « nettoyage » et « grand ménage » ont commencé

La tentative avortée de coup d’Etat du vendredi 15 juillet n’était pas semble-t-il l’aboutissement d’un processus d’agacement d’une partie de l’armée face au pouvoir de plus en plus personnel et autoritaire du président Racep Tayyip Erdogan… Non, depuis cette date, et après les 300 morts qu’a occasionnés la tentative de putsch, une nouvelle phase s’ouvre pour le pays d’Atatürk. Purges, arrestations, état d’urgence, rétablissement de la peine de mort…

50.000 fonctionnaires ont été limogés dans les corps de la police, de l’armée, de l’enseignement, de la magistrature… 8.000 autres individus ont été arrêtés, dont une majorité de militaires. Rien ni personne ne paraît plus devoir arrêter la volonté de vengeance du président, ni son désir de reprendre en mains son pays.

Recep Tayyip Erdogan a précisé mercredi soir que l'état d'urgence durerait trois mois au moins, expliquant que ce régime permettrait à son gouvernement de lutter rapidement contre les partisans du coup d'Etat. Concernant la peine de mort, il a aussi déclaré que si le parlement vote son rétablissement, il signerait immédiatement le décret l’instaurant.

L'instauration ces mesures exceptionnelles a pour objectif d'éviter que se produise une nouvelle tentative de coup d'Etat, a expliqué le ministre de la Justice Bekir Bozdag, assurant que les citoyens turcs ne ressentiraient aucun changement dans leur vie de tous les jours. le genre de discours qui fait froid dans le dos et qui rappelle la logique des régimes dictatoriaux qu’a connu la Turquie jadis.

De plus, les propos de certains ministres et du président, évoquant le « grand ménage » et le « nettoyage » de l’armée et de la fonction publique jettent une ombre inquiétante sur la Turquie d’aujourd’hui, que certains appellent déjà l’ « homme malade » de la région (pas autant que la Syrie qui, elle, est moribonde). La chasse est également ouverte, dans le monde entier, contre les « gülenistes », du nom du prédicateur islamiste Fethallah Gülen, dont l’extradition est demandée aux Etats-Unis. A ce propos, et selon notre confrère Yabiladi, des contacts auraient été entrepris par les Turcs en direction du Maroc pour obtenir des informations sur l’existence de structures liées de près ou de loin à la mouvance du leader exilé aux Etats-Unis.

Et déjà, en Europe, des voix s’élèvent, critiquant du bout des lèvres, mais critiquant quand même Erdogan en laissant entendre qu’il serait derrière le coup de force de la semaine dernière, soit en l’ayant directement téléguidé soit en laissant faire une tentative dont il aurait eu vent. L’accusation semble quand même fantasque et grave car ce sont 300 personnes qui ont perdu la vie. Cela étant, le limogeage de plusieurs dizaines de milliers de personnes et l’arrestation de plusieurs milliers d’autres indiquent que les listes sont prêtes depuis longtemps.

Mais l'étrange silence des Européens à l'égard de la Turquie d'aujourd'hi se justifie par les nécessités de la guerre contre l'organisation terroriste dite "Etat islamique" et aussi dans le besoin d'endiguer les vagues de migrants qui transitent par l'Anatolie pour rallier l'Europe. Le ministre des Affaires étrangères français, inquiet de ce qui se passe en Turquie, a émis des réserves, et il s'est entendu répliquer sèchement par Erdogan : "Il devrait se mêler de ses affaires. Est-ce qu'il a l'autorité pour faire ces déclarations à mon égard ? Non, il ne l'a pas. S'il veut une leçon de démocratie, nous pouvons aisément la lui donner"... L'ambiance est décidément très mauvaise au pays d'Atatürk...

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