Quand Nicolas Sarkozy veut remettre « le cerveau des terroristes à l’endroit »
Il est ancien président de la République et œuvre inlassablement à le redevenir. Pour cela, toutes les propositions sont bonnes à soumettre, même celles qui sont déjà appliquées, même celles qui ne sont pas applicables, même celles qui sont douteuses, voire dangereuses. Nicolas Sarkozy, puisque c’est de lui qu’il s’agit, était l’invité de l’ « Emission politique » de France 2 ce jeudi 15 septembre, et il en profité pour dérouler ses idées.
Les décisions déjà en œuvre, proposées quand même…
« Nous disposons d’un parquet national spécialisé dans les affaires financières, je ne vois pas pourquoi on n’aurait pas un parquet spécialisé dans les affaires terroristes. Est-ce moins grave ? Je ne le pense pas ». C’est louable et intelligent… sauf que ce parquet existe déjà, et il est de compétence nationale. Placé sous la direction du procureur François Molins, il est à la manœuvre dans toutes les affaires de terrorisme, et celles soupçonnées de l’être, qui ont secoué la France ces deux dernières années. Que Nicolas Sarkozy l’ignore, c’est grave ; qu’il fasse de la surenchère, c’est tout aussi grave. Qu’il manque d’idées au point d’en sortir certaines, réchauffées, c’est triste et inquiétant.
« Je demande que toute personne qui est sur un fichier S fasse l’objet d’un contrôle sur dossier ». A moins qu’il ne lise pas la presse, n’écoute pas la radio et ne regarde pas la télé, Sarkozy aurait dû savoir que les personnes fichées S font l’objet de contrôles réguliers, surtout dans le cadre de l’Etat d’urgence, qui permet les perquisitions inopinées et même en pleine nuit.
Les décisions inapplicables
« Les quelques centaines de personnes qui présentent des critères de dangerosité pour leurs fréquentations, la consultation régulière de sites jihadistes, leur radicalité… devront faire l’objet d’un examen approfondi et soit mises, en vertu du principe de précaution, en rétention administrative ».
C’est hardi, sauf que c’est illégal. La France est un Etat de droit, et les droits y ont leur place. C’est ainsi qu’en a décidé le Conseil d’Etat en décembre 2015 dans un arrêté qui rappelait en substance qu’ « aux termes des articles 7 et 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu'elle a prescrites et que tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ». L’article 66 de la Constitution dispose, « Nul ne peut être arbitrairement détenu. L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».
Les décisions dangereuses
L’idée est que les personnes jugées, condamnées, incarcérées et remises en liberté à l’expiration de leur peine soient placées en centres de rétention, pour une seconde peine de sûreté, « le temps de leur remettre le cerveau à l'endroit ». Il n’a en revanche pas expliqué comment il comptait s’y prendre, par hypnose, lobotomisation ou autre procédé aussi joyeux. « On a peut-être des centaines de jeunes qui ont la tête à l'envers avec ces histoires de djihadisme », a expliqué l’ancien président de la République, connu pour ses positions… radicales. Et donc, quand la justice dit son mot, Sarkozy préconise que l’Administration continue le « travail ».
Commentaires