Quel bilan tirer de la COP22 ?

Quel bilan tirer de la COP22 ?

Du 7 au 18 novembre, le monde avait les yeux sur Marrakech, où se tenait la Conférence de Parties ou COP22. L’enjeu, après l’Accord de Paris signé lors de la COP21 est entré en vigueur quelques jours avant le début de la COP22, étant de passer à l’action. L’action… mot d’ordre de la COP « marocaine ». 12 jours de débats, avec à la clé un Sommet africain pour l’action, quel bilan tirer alors ?

En fait, après l’immense succès de la COP21, celle de Marrakech devait mettre les choses en œuvre, et ne pouvait donc qu’avoir un rôle ingrat. Technique sur la mise en œuvre de cet accord dont les règles seront finalisées en 2018, elle a dû faire le dos rond après l’élection de Trump le climatosceptique.

Ce qu’on peut donc retenir d’essentiel est la réaffirmation des termes de l’Accord de Paris, en termes d’atténuation d’émissions de gaz à effet de serre et de limitation de l’augmentation de la température à moins 2° de plus que par rapport à l’ère industrielle. De même que les parties s’engagent encore à mobiliser 100 milliards en 2020 et à lancer des actions spécifiques.

De plus, le texte de la Déclaration finale prévoit l’obligation pour tous les pays de faire un point d’étape en 2017. Objectif : faire état de leurs émissions de gaz à effet de serre avec la possibilité, pour ceux qui ont pris du retard, de se faire aider afin qu'aucun pays ne reste sur le bord du chemin.

Par ailleurs, les Etats développés vont devoir revoir leurs ambitions à la hausse dès 2018. On demanderait à l’Europe par exemple de ne pas réduire ses émissions de 40% mais de 50%.

La COP22 a également accéléré le calendrier. En effet, les engagements pris pour 2020 ont été avancés pour 2018.

Mais même si l’agriculture est restée le secteur quelque peu délaissé par la COP 22, surtout en ce qui concerne les pays les plus touchés par les sécheresses et les inondations, le Sommet africain pour l’action a permis de prendre des initiatives tendant à atténuer les effets du changement.

On peut cependant reprocher à la COP22, en plus de la négligence relative de l’agriculture africaine, de ne pas avoir marqué un clair leadership des pays les plus avancés, pour compenser des séismes comme l’élection d’un climatosceptique à la tête des Etats-Unis. Ecoutons le cri du cœur de  Frank Bainimarama, le Premier ministre des îles Fidji, président de la future COP23, implorant les Etats-Unis, deuxième émetteur mondial de CO2, de s’investir : « J’implore Donald Trump de montrer sa puissance en oubliant que le réchauffement climatique est une farce, explique-t-il. Vous, Américains qui  êtes venus nous sauver en 1945, sauvez nous maintenant ! ». Plus sobre, le président de la COP22 Salaheddine Mezouar a fait appel à Donald Trump : « nous comptons sur votre pragmatisme et votre esprit d'engagement ».

Les autres décisions prises :

1/ Promesse de versement de 81 millions de dollars par les pays au Fonds pour l'adaptation ;

2/ Promesse de versement de 23 millions de dollars au Centre et réseau des technologies climatiques ;

3/ Approbation par le Fonds vert pour le climat de deux plans d'aide pour le Libéria et le Népal, à hauteur de 2,2 millions et 2,9 millions de dollars ;

4/ Lancement du Fonds d’investissement de Marrakech pour l’adaptation (MICA, doté de 500 millions de dollars ;

5/ Mise en place par le Maroc  de l’Initiative Bleue, pour assurer une pêche durable, qui passe par la concentration sur la pêche côtière et appelle à une meilleure capture du poisson, ce qui nécessite de l’observation et de la recherche, puis à une adaptation des bateaux, moins polluants, et enfin par le développement d e l’algoculture, qui séquestre le carbone et protège les océans.

6/ Le Maroc aussi présenté son initiative de l’Adaptation de l'agriculture africaine (ou Triple A), qui regroupe 27 pays. Son objectif est de soutenir l’agriculture africaine à faire face aux aléas climatiques à travers une meilleure gestion des sols, de l'eau et des risques. Le Groupe Crédit agricole du Maroc y joue un rôle central.

7/  Mise en place de la coalition "We Mean Business", avec aujourd’hui près de 500 entreprises capitalisant 8.000 milliards de $ qui se sont engagées sur un millier d’actions pour lutter contre le réchauffement climatique.

8/ Lancement de la plate-forme « 2050 pathways », regroupant des pays, des villes et des entreprises qui s'engagent à n'émettre plus aucun gaz à effets de serre d'ici 2050, dans l’objectif de ne plus émettre de GEZ en 2050.

Qu’est-ce que le Triple A ?

L’Adaptation de l’Agriculture Africaine, ou Triple1,  vise l’insertion, dans l’agenda de solutions contre le réchauffement climatique, d’une série de trois programmes portant le label Triple A. Le premier a pour objectif d’améliorer les fertilités des sols, la capacité de séquestration du carbone dans les sols et d’accroitre la reconversion vers l’arboriculture. Le second portera sur la maîtrise durable sur le continent de l’eau dans l’agriculture, tandis que le troisième permettra l’amélioration de la gestion des risques climatiques dans le secteur agricole.

On part du principe de lutter contre l’augmentation des émissions de carbone dégagées par les sols. Cette augmentation est due à des techniques agricoles inadaptées, qui ont endommagé les matières organiques dans les sols, les empêchant de séquestrer du carbone. Il faut donc agir dans quatre directions : l’accroissement de la fertilité des terres, la maîtrise de l’eau, la gestion des risques climatiques et la mise en place de solutions de financement adaptées pour les agriculteurs.

Il faut donc que les agriculteurs africains soient sensibilisés, sachant que l’Afrique représente 20% des capacités d’atténuation des sols, et qu’ils mettent sur pied des projets bancables, auxquels il faudra trouver des financements… Ce qui est une autre paire de manches, mais une paire qui devra être assurée dès 2020 par la cagnotte des 100 milliards de $.

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