Farid Mezouar: Aucune privatisation via la bourse ne semble se dessiner

Farid Mezouar: Aucune privatisation via la bourse ne semble se dessiner

Après une baisse de 19,7% enregistrée en 2022, le marché boursier marocain s'est rattrapé durant l'année 2023, en affichant une performance de +12,8% à 12 092,88 points. Cette évolution positive s'explique fondamentalement par le ralentissement de l'inflation après avoir atteint le sommet en début d'année, le niveau pluviométrique un peu meilleur par rapport à celui enregistré lors de la campagne agricole 2021/2022, la fin du cycle inédit de resserrement monétaire engagé depuis 2022 par les banques centrales, les résultats semestriels des sociétés cotées qui ont affiché, hors IAM, une hausse 12,6% au titre du premier semestre 2023, les chiffres d'affaires des sociétés cotées à fin septembre 2023 qui une hausse de 5,3%, en atteignant 218,3 milliards de dirhams et l'attribution de l'organisation de la coupe du monde 2023 au trio Espagne-Portugal- Maroc. Farid Mezouar, expert financier et  directeur exécutif de FL Markets (flm.ma) revient, dans cet entretien, sur l’évolution de la bourse de Casablanca en 2023 et les perspectives pour l’année 2024.

Quel est votre commentaire sur la bourse de Casablanca en 2023 ?

Le newsflow positif a été assez riche, notamment avec l’annonce de la co-organisation par le Maroc du Mondial 2030. De même, les contours d’une relance keynésienne se sont dessinés avec plusieurs aides directes au niveau social et au niveau de l’immobilier en plus de l’enveloppe réservée à la reconstruction post-séisme. Par ailleurs, les revenus des sociétés cotées ont augmenté de 6,4% pour les 9 premiers mois de 2023 tandis que la croissance économique connaîtrait, une amélioration graduelle passant de 1,3% en 2022  à 2,7% en 2023.

Ainsi, le MASI a affiché en 2023 une performance de 12,8% à 12 092,88 points ce qui constitue un rebond tonique après la contre-performance de -19,8% 2022. En effet, dans le cadre d’un scénario atypique, après une période de panique en début d’année à cause d’une hausse brutale des taux obligataires (baisse de -9,3% du MASI au 6 janvier sur près d’une semaine), le MASI a fortement rebondi grâce à une combinaison de plusieurs données fondamentales et d’un newsflow positif. Dans ce contexte, le MASI a bâti patiemment sa performance avec un rebond de 24,4% depuis le 6 janvier.

 

Les IPO demeurent assez rares depuis plus de dix ans. Qu’est-ce qui freine les entreprises à s’introduire à la place casablancaise ?

C’est un phénomène difficile à expliquer vu les nombreux avantages de la cotation comme l’aisance de levée de capitaux, la publicité gratuite et le benchmarking avec les best practices. Probablement, à l’image des entreprises radiées, certains actionnaires majoritaires ne souhaitent pas supporter la présence non-contrôlée des minoritaires. Aussi, la concurrence bancaire est présente car certains groupes préfèrent le financement par crédit bancaire à la levée de fonds propres. De même, l’Etat ne donne plus l’exemple car aucune privatisation via la Bourse ne semble se dessiner. 

Toutefois, tout n’est pas nor car certains groupes comme Dislog ont déjà annoncé leur intention d'introduction en Bourse en 2025 avec une échéance qui  peut être avancée en cas d’une fenêtre opportuniste du marché boursier. Par ailleurs, d’autres sociétés comme Laprophan ou Cash Plus, peuvent très bien franchir le pas de la cotation.

 

Quelles sont vos perspectives pour 2024 ? 

Concernant les prévisions, la croissance économique devrait poursuivre sa légère accélération. En effet, Bank Al-Maghrib prévoit une croissance du PIB de 2,7% en 2023, avant de s'accélérer davantage pour atteindre 3,2% en 2024 et 3,4% en 2025, selon ses dernières prévisions publiées le 19 décembre 2023. Le taux d'inflation, quant à lui, est prévu à la baisse : de 6,6% en 2022 à 6,1% en 2023, il devrait chuter à 2,4% en 2024 et à 2,3% en 2025.

Ces prévisions économiques pour l'année 2024 tiennent compte de la croissance mondiale modérée induisant un ralentissement de la demande mondiale adressée au Maroc et une légère atténuation de l'inflation sur les prix des matières premières au niveau mondial. Les projections se basent également sur un scénario d'une production céréalière moyenne et prennent en considération, la reconduction de la politique budgétaire mise en vigueur durant l'année 2023. 

Dans ce contexte, l’année 2024 devrait être une année de continuité de la relance du marché boursier. Ainsi, A Flm, nous pensons que le MASI pourrait renouer avec les 14.000 points et réussir un retracement technique complet. En effet, plusieurs voyants sont au vert, notamment dans le cadre de l'injection de pouvoir d’achat, grâce aux différents programmes d’aide directe. De même, cette relance se fait dans le cadre d’une “equity story” avec la co-organisation du Mondial 2030 et l’ancrage socio-économique à l’Espagne.

Recueillis par Abdelkader El Fatouaki

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