Transport : jusqu’où ira la société Alsa ?
Ce qui semblait être une aubaine pour les voyageurs marocains notamment casablancais risque d’être un cauchemar de plus.
Il est connu que dans les métropoles surtout africains le transport est un véritable casse-tête voir un parcours du combattant. Mais la ténacité des usagers et leur détermination à vaquer à leurs occupation peuvent masquer les failles voire les manquements des instances en charge de ce secteur.
Au Maroc, depuis quelque temps, la société espagnole Alsa filiale du britannique National Express s’impose comme leader incontournable dans le transport urbain et périurbain. Cependant, malgré cette main mise dans un secteur clé qui génère des milliards de dirhams, elle ne fait pas exception des manquements jadis connu dans ce secteur.
Depuis sa présence au Maroc, Alsa est loin de faire l’unanimité, pire de violation en violation des droits des travailleurs, des engagements non respectés… Alsa a fini de démontrer son incapacité à solutionner le transport urbain et périurbain marocain.
Le jeudi 31 octobre 2019 , les salariés de la société affiliés à l’Union marocaine du travail (UMT) avaient organisé une manifestation à Rabat afin de protester contre le rétrécissement de leurs droits syndicaux. En décembre de la même année, les médias rapportent que le Maire de Rabat Monsieur Mohamed Al-Siddiqui a confirmé que la société Alsa ne respecte pas leurs engagements envers ses employés. Selon le maire, « certains d’entre -eux ont touché seulement des salaires mensuels dont le montant varie de 500 -1600 à 2400 dh contrairement à leur attentes en rappelant que la société lors de démarrage de son activité, en tant qu’opérateur technique, a promis un salaire de 5000dh. »
Comme le pensent certains travailleurs dans d’autres secteurs d’activité, la pandémie du coronavirus est aussi un alibi pour certaines entreprises à ne pas honorer leurs engagements vis-à-vis de leur personnel voire même appliquer des mesures injustifiées et inégales. Sur ce, Alsa ne fait pas exception. Le 14 septembre, les employés de la Société de transport Alsa ont organisé un sit-in à Casablancais.
Dans une déclaration à Le Site Info, l’un des manifestants a exprimé la mauvaise surprise de la majorité du personnel d’Alsa, ce lundi 14 août 2020 , de se voir confier une nouvelle tâche qui n’est pas de leur ressort. Celle d’assumer le rôle de contrôleurs des bus de transport urbain.
Cette décision de la direction de la société a alors suscité colère et indignation des employés concernés. Selon les grévistes, ladite mesure est prise du jour au lendemain, sans préavis aucun et sans consultation des intéressés.
L’Affaire de trop !
Mi octobre, Alsa, filiale du groupe britannique National Express, a annoncé avoir remporté un contrat pour le transport urbain à Casablanca, capitale économique et plus grande ville de l'État, pour une période allant de 10 à 15 ans
Le contrat devrait générer un chiffre d'affaires de 1 000 millions d'euros et transporter 100 millions de passagers par an. Le contrat entrera en vigueur en novembre 2019 avec un parc initial de 400 bus, qui sera porté à 700 d'ici 2020. La concession comprend, outre l'exploitation de services de bus, l'introduction de nouveaux systèmes de paiement et la refonte du réseau.
En 2020, Alsa devrait ajouter 1 044 bus dans le pays, avec 263 millions de passagers et des revenus de 263 millions. Les chiffres devraient atteindre 1 744 véhicules, 405 millions de passagers et 157 millions de revenus en 2021.
Aujourd’hui c’est une tournure beaucoup plus grave qu’en prend la gouvernance de la société Alsa.
Dans sa livraison du lundi 19 Octobre, le quotidien arabe Al Massae dévoile des détails scandaleux sur la gestion déléguée du transport à la Ville de Casablanca.
D’après un document en possession du journal, la société Alsa aurait fait du « chantage à la Ville de Casablanca », en demandant des milliards en plus de ce qui a été négocié dans la convention précitée. Pire la filiale marocaine du britannique National Express « menace de se retirer de la ville si ses demandes ne sont pas acceptées. »
Selon la source, Alsa, unique société en charge du transport urbain et périurbain à la ville de Casablanca, soumet la Ville des exigences particulières en demandant, moins de 12 mois après son démarrage, de « revoir le contrat. »
Dans sa requête, la société demande une révision de la fiscalité et la prise en charge des pénalités alors que selon ses propres termes, elle n’a pas procédé au dépôt de déclaration de TVA depuis Novembre 2019.
De cette opportunité, Alsa enfonce le clou. Elle en profite pour demander la revue des conditions de facturation de ses services à la Ville. Et d’après le journal, Alsa avait convenu avec la Ville que « la facturation serait au forfait au lieu des frais réels majorés d’une marge ». Ce qui est intrigant, c’est que Alsa n’a pour le moment procédé à aucun investissement puisque « la ville lui a d’abord fourni des bus issus de l’ancien délégataire Mdina Bus, avant de lui accorder un blanc-seing de 120 millions de dirhams pour acheter 400 bus d’occasion soit 300.000 dhs par bus ».
Nonobstant les dispositions du contrat, Al Massae révèle que Alsa n’a jamais reversé la recette au délégataire. Dans son document, le journal précise que le courrier adressé par Alsa à l’ECI (Etablissement de Coopération Intercommunal) et au Directeur Général de Casa Transport qui doit recevoir les recettes, confirme l’information fait mais comporte la demande de Alsa à ce que cela (le non versement de la recette) devienne contractuel. Donc Alsa ne paye pas son dû à la Ville de Casablanca (les recettes doivent être reversées mensuellement à Casa Transport) et ceci depuis le démarrage du contrat le 1er Novembre 2019 mais par contre la société espagnole refuse que la ville la paye trimestriellement comme cela a été demandé par l’ECI.
« Alsa réclame 417 MDH à la Ville de Casablanca »
Cette nouvelle donne risque de bien faire l’affaire de la société Alsa contrairement à l’ancien délégataire Mdina Bus, car pour Alsa la Ville lui assure un matelas de sécurité financier.
Dans le détail, la source estime que si la Ville et le contribuable financent le parc de bus d’occasion (120 millions de dirhams) pour des bus achetés à 300.000 dhs alors que les tarifs affichés seraient plus autour de 150.000 dhs…
La ville, et donc le contribuable financent la moitié du nouveau parc de bus soit 350 bus (convention de financement de 1,1 milliard de Dirhams)
Mieux, le journal révèle que Alsa doit reverser la recette issue de la vente de tickets à Casa Transport mais ne l’a jamais fait ». En clair, Alsa réclame en plus que la Ville lui paye 137 millions de dirhams pour la période allant de novembre 2019 à avril 2020 soit près de 23 millions de dirhams par mois qui viendraient en plus de la recette séquestrée par les espagnols.
La Ville finance le plan social de Alsa
Dans le même document cité par Al Massae, Alsa réclamerait 60 millions de dirhams pour le financement du Plan de départs volontaires. La ville va donc subventionner la mise au chômage de nombreuses personnes. Alsa a d’ailleurs commencé à préparer le terrain en rétrogradant brutalement plusieurs superviseurs de la société à Casablanca, ce qui avait déclenché une vague de colère chez les travailleurs.
MN
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