Exposition : les voix et musiques du monde arabe célèbrent un millénaire d'histoire

Exposition : les voix et musiques du monde arabe célèbrent un millénaire d'histoire

Des chants pré-islamiques à l'électro-chaabi, l'exposition « Al Musiqua » explore sur une période de plus de quinze siècles les courants musicaux du monde arabe, ou plutôt des mondes arabes de la péninsule arabique à Damas, en passant par l'Égypte de la diva Oum Kalthoum, là où, sous l'impulsion d’Ismaïl Pacha (1863-1879), naquit une transformation profonde du pays qui aboutira à la Nahda, c'est-à-dire la renaissance politique et culturelle arabe. Une exposition qui donne à entendre la riche histoire musicale d'un monde arabe en perpétuel mouvement.

Une exposition qui veut battre en brèche les idées reçues

Présentée comme la première exposition d'envergure en France sur les musiques du monde arabe, « Al musiqa » est un hommage graphique très réussi à leur beauté et leur vitalité, des poèmes bédouins chantés avant l'islam jusqu'à Arab Idol, explique la Philharmonie de Paris. Mais, face aux préjugés qui entourent le monde arabe, ses conflits et ses immigrés, l'idée est aussi d'« aller à l'encontre de certains stéréotypes », explique à l'AFP Véronique Rieffel, commissaire de l'exposition. Il faut « sortir d'une appréhension purement géopolitique, idéologique et sociétale pour s'intéresser aux cultures et aux arts du monde arabe », dit-elle.

La démarche du parcours de l'époque pré-islamique au XXIe siècle

L'exposition remonte à l'art peu connu du temps de la « jahiliya », l'époque pré-islamique : les mélopées appelées « al-hida'« , dont le rythme était calé sur le pas du chameau, les « mouallaqat », ces poèmes récités ou chantés avec ou sans lyre, ou encore « Qaynats », musiciennes souvent esclaves venues de Perse ou d'Éthiopie. La suite peut surprendre le visiteur tant la question reste taboue : on entend « al adhan », ou l'appel à la prière du muezzin. Même si l'islam a cherché à limiter l'usage d'instruments qui rappelleraient les cérémonies polythéistes, il n'a pas pour autant banni la musique, quelle qu'ait pu être l'interprétation des uns et des autres par la suite.

Preuve en est l'âge d'or arabe sous les différents califats, notamment en Andalousie, avec le mélange de chants et d'instruments venus du Moyen-Orient et d'Espagne. L'exposition rappelle notamment la légende de Zyriab, fondateur de la musique arabo-andalouse, la rayonnante école de musique à Cordoue et Le Livres des chansons, monument de la littérature arabe médiévale.

« Il y avait un intense soutien de la musique par les califes qui étaient soit musiciens eux-mêmes, soit des mélomanes, chacun avait son musicien favori », explique la commissaire, soulignant que c'est à cette époque qu'on traduit les traités de musique grecs en arabe. On survole par la suite la musique mystique, après l'expansion de l'empire musulman en Afrique et le développement du soufisme et les musiques des confréries Gnawa au Maroc, le diwan (Algérie) et le stambali (Tunisie). Le clou de de l'exposition est un énorme tableau signé Chant Avedissian fait de portraits de grands chanteurs arabes du XXe siècle : Les Syro-Egyptiens Farid al-Atrache et sa soeur Asmahane, Abdel Halim Hafez – Le Rossignol du Nil - et bien sûr Oum Kalthoum, le symbole par excellence de la chanson arabe. Des figures qui ne sont pas étrangères en France : « En 1967, Oum Kalthoum a donné un concert à l'Olympia qui, selon les propos de Coquatrix, était le concert le plus extraordinaire jamais donné dans ce lieu mythique », rappelle Mme Rieffel. L'exposition fait également un clin d'oeil à la diva libanaise Fairouz, légende encore vivante du monde arabe, à sa compatriote Sabah et à d'autres chanteurs célèbres du Levant.

L'exposition consacre aussi un espace pour ces artistes immigrés du Maghreb qui ont « enrichi la vie culturelle française », dit la commissaire, rappelant que, dans « les années 80, le raï était la musique made in France qui représentait le mieux la France à l'international. La dernière galerie rend hommage à la musique arabe contemporaine, sous fond d'une musique connue sous le nom d'« électro-chaabi », mélange du chaabi ( style musical égyptien ) et effets électro-acoustiques.

La salle résonne du célèbre slogan « Le peuple veut renverser le régime » : les chanteurs d'« électro-chaabi » ont été très actifs durant la révolution égyptienne de 2011. »Aujourd'hui, on écoute des musiques arabes dans les clubs, les salles de concert, les boîtes de nuit, les festivals en France, souligne Mme Rieffel. Ce n'est plus quelque chose d'exotique, cela s'inscrit dans le quotidien

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