(Billet 13) - Les nouveaux corps intermédiaires, en rap, tifo et عونيات
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- 17 janvier 2019 --
- Opinions
Durant toutes ces années où nous disions que les corps intermédiaires ne remplissaient pas leur office, la société a évolué car ses moyens d’informations ont extraordinairement progressé et la rapidité des échanges a fait le reste. Aujourd’hui, ici et ailleurs, les populations se parlent directement, transversalement, sans plus avoir besoin de médias ou d’intermédiations.
Naguère, il y avait le peuple et ses dirigeants. Entre les deux, globalement, des syndicats, des partis et des médias. Le peuple écoutait ce qu’on décidait lui dire. L’information de tous était scrutée et l’action de chacun contrôlée. Pour les refuzniks, qui distribuaient des tracts ou tenaient des réunions clandestines, c’était la prison. Et ainsi, la maison était bien gardée. Mais ça, c’était avant…
Aujourd’hui, l’information est transverse. Tout le monde dit tout à tout le monde, vraies et fausses news se chevauchent et plus personne (ou presque) ne va en prison. Laissant le populisme aux politiques et à leurs egos et ambitions, les peuples n’ont plus désormais d’yeux et d’oreilles que pour ces gens que l’on appelle les influenceurs. Rationnels et parlant vrai, audibles et crédibles, ils ne sont pas populistes, puisqu’ils sont le peuple. Ils sont partout et s’adressent à tous, sur youtube ou twitter, sur Facebook et ailleurs. Ils ont des milliers de fans, amis et suiveurs… ils disent tout haut et clairement ce que les partis n’osent même pas penser très bas et confusément. Ils sont et font l’opinion publique, car leurs messages sont crus, forts, percutants…
Depuis peu, des inconnus devenus illustres font des vidéos (Swinga, Skizofren, …) y exposent et expliquent tout, absolument tout, sans tabou, déroulant les choses de bout en bout. En termes simples. Plus récemment, les chansons sont entrées dans la danse… la contestation se fait en musiques, en paroles fortes, qui marquent les esprits et se démarquent des partis et des partis pris.
Le public du Raja scande, dans des milliers de bouches, « f bladi dalmouni » (je souffre d’injustice dans mon pays, 8 millions de vues en un an), le rappeur Dizzy Dros clashe et cravache tout le monde dans son tube Moutanabbi (11 millions de vues en 10 jours), et tout récemment, les jusque-là peu connues العونيات (photo) mettent en ligne ce qui est en train de devenir un succès, « zid al malik zid zid » (allez, le Roi, allez… 0,5 million de vues en quelques jours) …
Les nouveaux corps intermédiaires sont là, et sont intraitables. Il faut en tenir compte. Les élections approchent…
Aziz Boucetta
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