Le Parti populaire espagnol s’éloigne de la modération en s’alignant sur VOX

Le Parti populaire espagnol s’éloigne de la modération en s’alignant sur VOX

Le Parti populaire (PP), historiquement perçu comme un pilier du centre-droit modéré en Espagne, s’est récemment engagé dans une trajectoire politique marquée par un rapprochement notable avec VOX, parti d’extrême droite. Ce glissement s’observe particulièrement dans le traitement de la question migratoire, un sujet devenu central dans le débat public espagnol.

Depuis 2019, le PP a scellé plusieurs accords régionaux avec VOX, notamment en Andalousie, dans la Communauté valencienne ou en Murcie. Ces alliances ont donné lieu à des mesures concrètes visant à durcir la politique migratoire : réduction de l’accès aux aides sociales pour certains migrants, limitation du rôle des ONG, fermeture de centres d’accueil pour mineurs étrangers non accompagnés.

Le cas de Jumilla, en Murcie, illustre les conséquences de ce virage. Le conseil municipal, dominé par une coalition PP-VOX, a interdit l’usage d’espaces publics pour des célébrations religieuses musulmanes, une décision qui a provoqué une vive polémique, y compris chez les autorités religieuses catholiques.

Santiago Abascal, leader de VOX, continue de radicaliser son discours, qualifiant l’islamisme d’“idéologie extrémiste et totalitaire” et appelant à l’interdiction du port du voile dans les lieux publics. Ce ton trouve désormais un écho dans la communication officielle du PP, marquant une rupture avec sa tradition plus modérée.

Ce changement suscite des inquiétudes au sein même du PP, où certains responsables redoutent de perdre l’électorat modéré qui a longtemps été son socle. Par ailleurs, cette évolution pourrait peser sur les relations diplomatiques avec les pays arabes, avec lesquels l’Espagne entretient des liens historiques profonds.

Sur le plan politique, ce repositionnement s’inscrit dans un contexte de concurrence accrue à droite. VOX, avec son discours nationaliste et sécuritaire, a réussi à capter une partie de l’électorat, incitant le PP à durcir ses positions pour tenter de reconquérir ce segment. Ce pari, cependant, reste risqué : il pourrait accentuer la polarisation sociale et fragmenter davantage le paysage politique espagnol, fragilisant les forces traditionnelles.

Enfin, sur la scène européenne, cette stratégie éloigne le PP de la prudence affichée par d’autres partis conservateurs, qui évitent les alliances trop étroites avec l’extrême droite, conscientes des risques pour la cohésion sociale et la stabilité démocratique.

Le choix du PP sera décisif pour son avenir politique, tant sur le plan interne qu’international. Entre pragmatisme électoral et risques de marginalisation, il illustre les tensions qui traversent la droite européenne aujourd’hui.

Par Omar Lamghibchi

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