Immobilier/vices cachés: Décryptage d’un expert

Immobilier/vices cachés: Décryptage d’un expert

Le Directeur général du cabinet GUI4, expert en immobilier et member of the Royal Institution of Chartered Surveyors (MRICS), Mohamed Lazim, explique dans une interview à la MAP les défauts considérés comme des vices cachés lors de l’achat d’un bien immobilier, la garantie des acquéreurs et les conditions à respecter pour la mise en œuvre de cette garantie.

– Qu’est-ce qu’on entend par vice de construction ? Qu’est ce qui le caractérise, sur le plan juridique, par rapport à un défaut de construction ?

Aux termes de l’article n° 549 du Dahir des Obligations et des Contrats (DOC), le législateur fait la distinction entre les vices et les défauts. En effet, les vices sont définis comme étant ceux qui diminuent sensiblement la valeur du bien ou qui le rendent impropre à l’usage auquel il est destiné d’après sa nature ou d’après le contrat. Par contre, les défauts sont ceux qui diminuent légèrement la valeur ou la jouissance et ceux qui sont tolérés par l’usage.

Pour illustrer ces vices de construction découverts souvent suite à l’achat d’un bien immobilier (appartement, villa, …), on cite les exemples suivants: fuites d’eau au niveau des canalisations, apparition des taches d’humidité sur les murs, infiltrations d’eau suite à une défaillance dans l’étanchéité des terrasses, fissures structurelles dans les poteaux et murs, décollement du revêtement, etc.

La distinction entre les vices et les défauts est déterminante dans la mesure où les vices sont généralement garantis, tandis que les défauts ne le sont pas.

– Quels sont les problèmes que rencontrent les acquéreurs des biens immobiliers en cas de constatation de vices de construction ?

En cas de constatation de vices de construction, les témoignages affluent. Tel acquéreur qui fait face à un vendeur qui refuse de le dédommager ou de réparer le vice. Tel autre qui essaie de prouver que le vice préexistait à la vente. Quant aux acquéreurs qui finissent par emprunter la voie judiciaire, ils sont légion.

– Existe-t-il une garantie réglementaire au profit de l’acquéreur en cas de constatation de vices de construction ? A quelles obligations est soumis le vendeur ?

Toutes les opérations de vente des biens immobiliers (appartements, villas, …) passent par deux phases réglementaires: “Avant la délivrance du bien” et “Après la délivrance du bien”.

Conformément à l’article n°549 du DOC, durant ces deux phases et en cas de constatation d’un vice de construction, le vendeur est tenu à l’obligation de garantie et devra ainsi entamer, sans délai, leurs réparations ou dédommager l’acquéreur.

En guise de rappel, la délivrance a lieu, en vertu de l’article n°499 du DOC, lorsque le vendeur se dessaisit du bien vendu et met l’acquéreur en mesure d’en prendre possession sans empêchement. Et selon une jurisprudence constante de la Cour de Cassation Française (Civ. 3°, 25 juin 2008, n°07-14-341), la délivrance d’un bien immobilier vendu est prouvée par la remise des clés.

– Maintenant que nous avons identifié la garantie susceptible de s’appliquer, quelles sont les conditions à respecter pour sa mise en œuvre ?

Le législateur, à travers le DOC, a précisé les conditions nécessaires pour bénéficier de la garantie réglementaire des vices de construction. En effet, avant la remise des clés, les vices apparents, les vices déclarés par le vendeur, les vices dont l’acheteur a eu connaissance ou ceux qu’il aurait pu facilement reconnaître, sont garantis par le vendeur lorsqu’ils sont réclamés par l’acquéreur et cela, conformément aux articles n° 569 et n° 571 du DOC.

A défaut de réclamation par l’acquéreur, ces vices sont réputés acceptés par lui et ne peuvent faire l’objet d’aucune garantie postérieure par le vendeur. Après la remise des clés, le vendeur est tenu de garantir les vices cachés qui remplissent les conditions suivantes:

– Le vice ne devait pas être apparent au moment de la remise des clés ;

– Le vice doit être antérieur à la remise des clés. Souvent, il faudra une expertise pour que la condition d’antériorité soit prouvée ;

– L’acquéreur ne devait pas avoir eu connaissance de l’existence de ce vice au moment de la remise des clés ;

– Le vice ne devait pas être déclaré par le vendeur avant la remise des clés ;

– Le vice ne pouvait pas être vérifié, par l’acquéreur, au moment de la remise des clés.

En ce qui concerne le délai de garantie des vices cachés, l’acheteur dispose, conformément à l’article n° 573 du DOC, d’un délai de 365 jours maximum à partir de la remise des clés (à peine de déchéance) pour intenter toute action réclamant la réparation de ces vices cachés.

Cette disposition a été abrogée par l’article n° 65 de la loi 31-08 édictant les mesures de protection des consommateurs. En effet, l’article n° 65 précité remplace le délai de 365 jours par un délai de 2 ans à partir de la date de la remise des clés.

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